Face à la presse, hier, certaines Organisations de défense des droits de l’homme ont tapé du doigt sur la table, pour fustiger le mutisme de l’Etat du Sénégal, dans l’affaire dite Lamine Diack. En effet, d’après les têtes de file respectives de la Ligue Sénégalaise des Droits Humains (LSDH), du Forum du justiciable et de la Rencontre Africaine pour la Défense des Droits Humains (RADDHO), nos autorités n’ont pas daigné bouger le petit doigt pour, au moins, manifester leur engagement à apporter leurs soutiens diplomatique et moral à celui qui a maille à pâtir avec la justice française. Mieux, selon Me Assane Dioma Ndiaye, la famille de Lamine Diack a été déboutée de sa demande d’audience avec le chef de l’Etat, en vue, certainement, de lui solliciter de l’assistance. Une situation qui dénote, si l’on se fie aux explications des droits de l’hommiste, d’une fuite en-avant du locataire du Palais. Notons quand même que les doutes émis quant à l’engagement des autorités aux côtés de l’ancien patron de l’IAAF ne semblent pas être dénudés de sens. En effet, accroché au téléphone pour éclairer la lanterne des Sénégalais sur la question, le Ministère des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’Extérieur a servi une réponse qui…fait froid dans le dos. «Cette affaire ne relève pas de la compétence du Ministère des Affaires Etrangères et des Sénégalais de l’Extérieur», a-t-on balancé à la figure de votre canard.
La bataille pour le «sauvetage» de l’ancien Président de l’IAAF, Lamine Diack, se poursuit de plus belle. En effet, ce combat, pour amener les autorités sénégalaises à, «au moins, montrer leur détermination à accompagner le mis en cause pour le respect de ses droits, malgré les accusations de corruption qui pèsent sur lui», a repris son cours. Hier, un Collectif d’Associations de défense des droits de l’homme (LSDH, RADDHO, Forum du justiciable…) s’est mobilisé comme un seul homme pour décrier ce qu’il appelle un mutisme des autorités sénégalaises face à l’interdiction de sortie du territoire français qui frappe Lamine Diack, ancien Président de la Fédération internationale d’athlétisme. Accusé d’avoir touché des pots-de-vin pour étouffer le dopage d’athlètes russes. L’occasion a, en tout cas, été saisie par ceux qui luttent pour la restauration de la dignité humaine pour vider leur sac.
D’après Me Assane Dioma Ndiaye, les Organisations de défense des droits humains expriment, de la façon la plus solennelle, leurs préoccupations et inquiétudes relatives à la situation de Lamine Diack, ancien Président de l’IAAF et citoyen sénégalais, sous le coup d’une procédure judiciaire avec mise en examen en France, depuis plus de 2 ans. Leurs Organisations, dit-il, sont d’autant plus préoccupées qu’à l’examen des éléments du dossier en leur possession, le présumé n’a jamais, d’après eux, bénéficié de la protection consulaire et diplomatique qu’il était en droit d’attendre de son pays d’origine, le Sénégal. De plus, selon elles, d’autre part, ses requêtes tendant soit à la levée du contrôle judiciaire le privant de sa liberté d’aller et de venir, soit à un aménagement de celui-ci sont, selon Me Assane Dioma Ndiaye, systématiquement rejetés par le juge d’instruction français, sur la base de préjugés attentatoires à sa dignité et à la présomption d’innocence, dont il bénéficie jusqu’à ce que sa culpabilité soit reconnue.
«La demande d’audience de la famille de Lamine Diack a été rejeté par le palais…»
Dans sa colère noire, l’Avocat d’informer que, depuis l’enclenchement de la procédure, le Palais n’a posé aucun acte sérieux pour la protection des droits de Lamine Diack. D’ailleurs, pour, certainement, donner la preuve de l’indifférence dont a fait montre le régime en place au sujet de cette affaire, Me Dioma Ndiaye d’enchainer que: «même la demande d’audience adressée par la famille de Lamine Diack, pour rencontrer le Président de la République a été rejetée».
Seydou Diack : «nous sommes laissés à nous-mêmes par l’Etat du Sénégal, qui devrait, pourtant, user de ses moyens de pression pour desserrer l’étau autour de notre père»
En tout cas, il assume qu’à l’heure où il nous parlait, la famille n’a pas été reçue. Une pilule amère pour lui et ses compagnons de lutte. Dans la même veine, le fils ainé de la faille Diack exprime sa désolation en confirmant que depuis le début de cette affaire, il n’a pas senti, un seul instant, l’engagement de nos autorités dans ce dossier. «Nous sommes laissés à nous-mêmes par l’Etat du Sénégal, qui devrait, pourtant, user de ses moyens de pression pour desserrer l’étau autour de notre père», lance Seydou Diack.
Les idées ne tarissant pas du côté de Me Dioma Ndiaye pour, dit–il, dire tout ce que les Sénégalais ignorent de ce dossier, le spécialiste du droit de soutenir, pour expliquer la violation de la présomption d’innocence de «son» client que :«affirmer, péremptoirement, comme motivation à telles décisions de rejets que Lamine Diack ne présente pas de garanties de représentation ou qu’il y’aurait des risques de fuite pour une personnalité qui a servi la plus grande partie de sa vie son pays le Sénégal et le monde à travers ses fonctions électives au niveau du CIO et de l’IAAF relève d’un parti pris et d’une stigmatisation inacceptable, incompatible avec les exigences d’un procès juste et équitable».
«Le contrôle judiciaire ne saurait être absolu, au point de priver la personne qui en fait l’objet de visiter sa famille»
Par ailleurs, le Président du Forum du Justiciable, Babacar Ba, a expliqué que le contrôle judiciaire avec interdiction d’aller et de venir ou la mise en détention ne doivent être ordonnés que s’ils représentent l’ultime ratio des mesures nécessaires à la poursuite de l’information et à la représentation en justice de la personne mise en examen. Ainsi, dans tous les cas, ajoute M Ba, le contrôle judiciaire ne saurait être absolu, au point de priver la personne qui en fait l’objet dans un contexte d’extranéité du droit de visiter sa famille dans des conditions fixées par le juge d’instruction. Or, poursuit-il, Lamine Diack est, selon lui, totalement, coupé de sa famille demeurant au Sénégal depuis sa mise en examen alors et surtout que sa présence en France, au moment de son interpellation, était fortuite et obéissait à une invitation du Comité olympique français.
Il s’en déduit, si l’on s’en tient aux explications du Secrétaire général de la Raddho, Sadikh Niass, que la compétence absolue des juridictions françaises et l’obligation qui lui est imposée de rester en territoire français procèdent d’un choix délibéré de ce pays et d’une non-assumation du Sénégal, pays dont Lamine Diack, est ressortissant, de sa compétence première.
Les autorités sénégalaises appelées à agir au plus vite…
Au vu de toutes ces remarques, Me Assane Dioma Ndiaye invite les autorités sénégalaises à exiger, sans délai, la communication du dossier de Lamine Diack, soit en vertu de sa compétence première du fait de la qualité de nationalité de celui-ci, soit en vertu de l’accord de coopération judiciaire liant le Sénégal à la France. De plus, le juriste insiste sur l’urgence de l’assistance consulaire et de la protection diplomatique, dont il est en droit d’attendre du pays, dont il détient la nationalité exclusive à savoir le Sénégal.
Non sans appeler les autorités françaises à veiller au respect de la présomption d’innocence et aux droits intangibles de Lamine Diack inhérents à toute personne humaine quelles que soient les circonstances et notamment le droit de rester en contact permanent avec sa famille.
Soro Diop, Chargé de la Communication du ministère des affaires étrangères : «cette affaire ne relève pas de la compétence du Ministère des Affaires étrangères…»
Interpellé sur la sortie des «Avocats» de Lamine Diack pour lui permettre de donner la version du Ministère sur les allégations des défenseurs des droits humains, Soro Diop s’est voulu très formel. En effet, au bout du fil, le Chargé de la Communication de Me Sidiki Kaba de dire : «je n’en sais rien…». Ce qui est très bizarre, puisque l’on sait que, si, vraiment, le dossier a été traité dans ce département dont il gère la communication, il en saurait certainement quelque chose. Ce qui revient à dire que Me Assane Dioma Ndiaye et Cie n’auraient pas tout à fait tort de dire que les autorités ne se soucient pas de cette affaire Lamine Diack, qui est le dernier de leurs soucis. Mais nous insistons, pour, au moins, tirer une information, quelle qu’elle puisse être pour nos lecteurs. Aussi surprenant que cela puisse paraitre, Soro revient à la charge pour ajouter ceci : «Ecoutez monsieur, ne me faites pas entrer dans ces détails, car je n’en sais rien, c’est le Ministère de la Justice, qui gère ce dossier». Avant de poursuivre, avec une certaine légèreté, que tout ce que le Ministère des Affaires étrangères peut faire, «c’est apporter une assistance morale». Ainsi, à la question de savoir où en sont les Services du Ministère sur cette assistance, dont il parle, notre ancien confrère Soro dit qu’il ne peut rien dire non plus à ce sujet. Non sans préciser que même s’il arrivait que le Ministère soutienne Lamine Diack, ce serait, en collaboration avec le Ministère de la Justice.