Theresa May a pointé Moscou du doigt, lundi 12 mars 2018. La Première ministre britannique a déclaré devant le Parlement britannique que la responsabilité de l’Etat russe était « hautement probable » dans l’empoisonnement de l’ex-agent double Sergueï Skripa et de sa fille en Angleterre la semaine dernière. La Russie n’a cependant pas l’air de vouloir répondre à son ultimatum.
Plutôt que d’annoncer des sanctions immédiates contre la Russie, Theresa May a choisi de lancer un ultimatum au Kremlin, ce qui lui donne le temps d’ameuter ses alliés et d’organiser sa riposte contre ce qu’elle appelle une « agression russe », analyse notre correspondant à Londres, Muriel Delcroix.
Si Moscou n’a pas répondu de façon « crédible », la dirigeante britannique pourrait annoncer demain mercredi l’expulsion de diplomates, la révocation de visas, le gel des avoirs des oligarques installés à Londres et proches de Vladimir Poutine, ou encore un boycott diplomatique de la Coupe du monde de football en Russie.
Donald Trump laisse Rex Tillerson commenter l’affaire
La réponse dépendra du soutien international que la Première ministre aura réussi à rassembler autour de cette affaire d’empoisonnement. Theresa May a convenu lundi soir avec le président français Emmanuel Macron d’agir « de concert avec les alliés » pour répondre au « comportement agressif de la Russie ».
Mais pour l’instant, le soutien est des plus mesurés : le secrétaire général de l’Otan s’est contenté de juger l’empoisonnement « très préoccupant pour l’Alliance altantique ». Et le président américain, occupé à se défendre de s’être trouvé en collision avec Moscou en 2016, n’a toujours pas réagi directement.
May aura besoin d’un soutien ferme du « grand frère »
Certes, le secrétaire d’Etat américain Rex Tillerson a dit faire « toute confiance à l’enquête britannique » dans cette affaire. Il s’est entretenu avec le ministre anglais des Affaires étrangères, Boris Johnson, pour convenir que des sanctions doivent être prises contre des responsables de cet empoisonnement.
Les Etats-Unis sont néanmoins les alliés les plus proches et les plus puissants du Royaume-Uni. Si Londres veut infliger une réplique susceptible de faire réfléchir Vladimir Poutine à la suite de ses actions, Theresa May aura besoin d’un soutien ferme et inconditionnel du « grand frère » américain.
Vers une nouvelle escalade verbale entre les deux pays ?
D’autant que la formule choisie par le ministère russe des Affaires étrangères, comme le rappelle notre correspondant à Moscou Daniel Vallot, en dit long sur l’état d’esprit des autorités vis-à-vis du gouvernement britannique et de la menace de nouvelles sanctions : « Un numéro de cirque et une provocation. »
Dans les prochaines heures, on peut donc s’attendre à une nouvelle escalade verbale entre les deux pays, mais sans doute pas espérer un geste de conciliation de la part de la Russie. Il faut rappeler qu’outre les affaires d’espionnage, les relations diplomatiques entre Londres et Moscou sont déjà exécrables.
Difficile d’imaginer que Vladimir Poutine puisse fléchir
Au sein des pays européens, la Grande-Bretagne est le pays qui reste le plus intraitable sur la question des sanctions prises contre Moscou depuis l’annexion de la Crimée. On peut citer, parmi les sujets de contentieux entre la Russie et le Royaume-Uni, l’Ukraine, la Syrie et les accusations d’ingérence électorale.
A cinq jours de la présidentielle, difficile d’imaginer Vladimir Poutine, candidat à sa réelection, fléchir, alors qu’il a fondé une partie de sa popularité sur sa capacité à tenir tête à l’Occident. La Russie devrait donc adopter l’attitude qui est la sienne lorsqu’elle est mise en cause à l’étranger : dénoncer un complot, une machination destinée à l’affaiblir sur la scène internationale.