Des missiles ont frappé un aéroport militaire syrien ce lundi 9 avril matin faisant plusieurs morts, a rapporté l’agence officielle syrienne Sana. Ces frappes sur l’aéroport de Tayfur, près de Homs, interviennent alors que les présidents américain et français ont annoncé vouloir apporter une « réponse forte et commune » à une « attaque chimique » qui a fait des dizaines de morts dans la Ghouta orientale le samedi 7 avril. Cependant, Américains et Français nient avoir procédé à l’attaque. Russie et Syrie accusent Israël.
L’origine de la frappe reste pour le moment indéterminée. L’armée américaine, mise en cause dans un premier temps, par les médias officiels syriens, a très rapidement démenti. C’était la première piste, puisque Donald Trump avait publié hier, une série de tweets très fermes à l’égard de Bachar el-Assad et de Vladimir Poutine, écrivant qu’il faudrait « payer » le prix après l’attaque chimique présumée contre la population de la Ghouta samedi dernier. Le démenti de l’armée française est intervenu plus tardivement. Vers 9h ce lundi matin, le ministère français de la Défense a déclaré ne pas avoir effectué de raid aérien en Syrie dans la nuit de dimanche à lundi.
Et Israël ?
Reste l’armée israélienne. Si elle se refuse à tout commentaire pour le moment, elle est désormais pointé du doigt par l’armée russe mais également par la Syrie: « L’agression israélienne sur l’aéroport T-4 a été menée par des avions F-15 qui ont lancé plusieurs missiles », selon une source militaire citée par l’agence officielle Sana.
Rappelons que l’armée israélienne a déjà visé, c’était en février dernier, cette base aérienne T-4 située entre Homs et Palmyre au nord de Damas. L’armée israélienne agissait alors en représaille après qu’un drône eut pénétré dans l’espace israélien. Les renseignements israéliens affirmait alors que cette base militaire aérienne accueillait des membres de l’unité d’élite des gardiens de la révolution iranienne.
Les Israéliens ont les moyens de mener des frappes, dites « à distance de sécurité » avec des missiles de croisières, sans s’exposer aux défenses aériennes de l’adversaires. Ils peuvent utiliser leur missiles Popeye notamment, lancé depuis des chasseurs F-16 ou F-15 ou même depuis des sous-marins Dolphin, ce qui serait une première.
Un « faucon » américain entre en scène
Hasard du calendrier, c’est ce jour qu’entre en scène le nouveau conseiller à la sécurité nationale de Donald Trump, le « faucon » John Bolton, écrit notre correspondant à New York, Grégoire Pourtier ; celui-ci plaide depuis longtemps pour un bombardement en Syrie. Si les Américains souhaiteraient encore confirmer la véracité de l’attaque à l’arme chimique, le président a cependant prévenu dès hier qu’il y aurait « un prix fort à payer », traitant Bachar el Assad d’« animal ».
En tout cas, Trump – qui n’a de cesse de dénoncer les reculades de Barack Obama, comme en 2013 dans de circonstances similaires – a déjà prouvé qu’il était capable d’ordonner des frappes massives il y a tout juste un an.
Des vidéos montrent le ciel libanais traversé par un missile
Lundi 9 avril, très tôt, les médias syriens avaient fait état de tirs de missiles de croisière visant l’aéroport militaire syrien de Tayfur situé près de Homs. Parallèlement, des internautes libanais ont diffusé des vidéos du ciel libanais traversé par un missile, celui-ci venant donc de la Méditerranée et se dirigeant vers l’Est.
Une information confirmée par notre correspondant régional, Paul Khalifeh, qui souligne que les missiles ont traversé le ciel du Liban, et que cinq explosions ont été entendues au-dessus de la plaine orientale de la Bekaa. Plusieurs médias et journalistes proches de Damas ont, eux, fait état d’une attaque aux missiles de croisière contre l’aéroport T-4, situé entre les villes de Palmyre et de Homs, dans le centre de la Syrie.
Une source syrienne citée par plusieurs médias a indiqué que le système antimissile syrien a riposté aux attaques qui ont fait plusieurs morts et blessés, sans fournir un bilan plus détaillé. Selon l’OSDH, 14 combattants, dont des Iraniens, ont été tués dans la frappe.
« Je ne vois pas en quoi utiliser l’arme chimique est contre les intérêts de Bachar »
L’indignation internationale s’est fait sentir après ce qui ressemble à une nouvelle attaque chimique à Douma. Bachar el-Assad, a déjà reconquis 95% des territoires rebelles de la Ghouta orientale. Quel intérêt a-t-il à utiliser de nouveau les armes chimiques ? « Je ne vois pas en quoi utiliser l’arme chimique est contre les intérêts de Bachar », explique Olivier Lepick, chercheur associé à la Fondation pour la recherche stratégique (FRS) et spécialiste des armes chimiques et biologiques. « Les intérêts de Bachar el-Assad, c’est de terroriser la population, c’est d’annihiler physiquement la rébellion. Donc, même quand il utilise des armes physiques, il ne passe rien, il n’y a pas de réplique militaire de la part de l’Occident. Donc, quand on dit qu’il n’est pas dans les intérêts de Bachar d’utiliser une arme chimique, moi je ne comprends pas très bien pourquoi on dit cela », poursuit-il.
« C’est un argument qui ne tient pas la route, continue Olivier Lepick. S’il n’était pas dans les intérêts de Bachar el-Assad d’utiliser l’arme chimique, il n’utiliserait pas d’arme chimique, et pourtant il l’a fait à de nombreuses reprises, de manière totalement avérée, condamné par des enquêtes des Nations unies et l’Organisation de l’interdiction des armes chimiques. Donc l’argument qui consiste à chaque fois à dire : mais pourquoi, quel est l’intérêt ? L’intérêt, c’est de mener cette guerre de terreur contre la population et de faire comprendre aux rebelles qu’il n’y aura pas pour eux d’autre sort qu’une mort terrible. Et c’est exactement un message répété depuis des années part le régime à l’égard de la rébellion ».