On a beau fouiller les rangs de l’Alliance pour la République, il sera difficile de trouver un responsable doté d’un franc-parler comme celui de Lass Badiane. En effet, Président du Mouvement « Jëm kanam », le chargé de la Communication de «Benno Bokk Yakaar» a, dans un entretien accordé à SourceA, balancé à la figure de Macky Sall et son régime ses vérités crues. Morceaux choisis de la kyrielle de certitudes du responsable de l’Alliance pour la République de Grand-Yoff : «à Grand-Yoff, on vit dans la misère. Et la faute incombe au Président Macky Sall qui a privilégié les transhumants au détriment de ses militants ; le taux de chômage des jeunes qui est de plus en plus élevé, constitue la véritable bête noire du régime en place. Pendant ce temps, des ministres et autres Directeurs généraux dilapident l’argent du contribuable à leur guise ; le ministre Serigne Mbaye Thiam a faussé les négociations, dès le début du processus en n’ayant pas été sincère avec les enseignants».

Convaincu que le parrainage est une mauvaise idée, Lass Badiane se veut formel : «un mauvais dossier, il ne faut pas essayer de l’améliorer. Il faut le supprimer. Le parrainage n’apporte rien de bon. Ni pour l’opposition, ni pour le Président de la République, ni pour la Coalition Bby, encore moins pour la stabilité du pays».

Et, quand l’opposition menace de ne rien épargner pour bloquer le passage de cette loi à l’Assemblée nationale, le responsable du Parti présidentiel, qui a brûlé certains responsables de la Mouvance présidentiel à l’image de Me Ousmane Seye, se veut ferme : «il faut en tenir compte. L’épisode du 23 juin 2011 devrait servir de leçon».

SourceA: depuis quelque temps, on note une léthargie de la Coalition «Benno Bokk Yaakaar» dans le département de Dakar. Quelles peuvent en être les raisons, selon vous?

Lass Badiane : « vous n’avez pas tort d’évoquer cet état de fait. En effet, il y a bien une léthargie de la Coalition dans le département. Et cela est dû par le fait que les militants sont frustrés. Après s’être battus, depuis près d’une dizaine d’années, aux côtés du Président de la République, des militants de première heure se sont retrouvés délaissés, sans aucune reconnaissance, qui soit à la hauteur de leurs sacrifices. Surtout à Grand-Yoff, on vit dans la misère. Et, la faute incombe au Président Macky Sall, qui a privilégié les transhumants au détriment de ses militants, qui sont souvent récompensés par de petits postes de rien du tout. Quand on se battait, en 2012, et même avant, ces gens-là nous trainaient dans la boue, nos calomniaient, en le traitant de tous les noms d’oiseaux. Et pourtant, aujourd’hui, au sein de la Coalition, ils nous toisent, parce qu’ils sont mieux traités que nous. A la veille de la Présidentielle de 2012, Me Ousmane Seye a défendu mordicus le ticket que le Président Wade voulait faire passer. Et pourtant, il fait partie des transhumants les mieux récompensés, en siégeant au Haut Conseil des collectivités territoriales. Et il n’est pas le seul, d’ailleurs, il y a aussi Aliou Sow et plein d’autres Directeurs généraux. Il est temps que le Chef de l’Etat s’approche de ses militants et remobilise ses troupes. Parce qu’il y a trop de couacs. D’abord, le taux de chômage des jeunes qui est de plus en plus élevé, constitue la véritable bête noire du régime en place. Pendant ce temps, des ministres et autres Directeurs généraux dilapident l’argent du contribuable à leur guise. En  plus de cela, il y a un manque criard de solidarité gouvernementale. Les différents départements ministériels se livrent à une rivalité sans nom, parce que voulant taper dans l’œil du Président de la République. Ils passent leur temps à se crêper le chignon. Malheureusement, cette situation peut conduire à la fuite des investisseurs et ça nous empêche d’avancer. Le Chef de l’Etat doit tirer des leçons de ce qui s’est passé avec Wade ».

SourceA : à vous entendre parler, vous rejoignez la position de Youssou Ndour et Me Alioune Badara Cissé qui ont, tous les deux, déploré le manque de coordination et d’entente au sein même de Benno?

Lass Badiane : « mais oui, bien sûr. Et ils ont raison sur toute la ligne. Et c’est cela qui risque de nous perdre. Par exemple, à Grand-Yoff, c’est par manque d’entente que, lors des Législatives, on a perdu à Grand-Yoff. Vous trouvez normal que Khalifa Ababacar Sall, qui est prison rafle tous les suffrages, alors que le Président de la République, par ailleurs président de la Coalition Bby, a mis des moyens colossaux à leur disposition? Ce n’est pas normal. Pourtant, ce ne sont pas les responsables Apr, qui manquent dans la Commune de Grand-Yoff. Parmi eux, on peut citer Cheikh Bakhoum, Directeur de l’ADIE, Me Sèye, Haut conseiller, trois députés et trois représentants au CESE. C’est, tout simplement, la preuve qu’ils n’ont aucune plus-value. C’est à ce demander s’ils sont intéressés par les préoccupations des habitants Grand-Yoff. D’autant plus que seuls deux d’entre eux vivent à Grand-Yoff. Ils ne sont même pas imprégnés des maux et souffrances auxquels sont confrontées les populations. Ils ne font que remplir leurs poches ».

SourceA : que pensez-vous, alors, de cette ébullition du front social ? Tous les secteurs sont en mouvement d’humeur et tous réclament le respect des engagements pris par l’Etat. Quelle est votre sentiment, à quelques mois de la Présidentielle de 2019?

Lass Badiane : « Tous les travailleurs ont le droit constitutionnel de syndiquer et d’observer un mouvement d’humeur. C’est tout à fait naturel. Cependant, il faut en appeler à la responsabilité et au sens du patriotisme de tout un chacun. Dans de pareilles situations, il faut tenir un langage de vérité aux principaux concernés. Vous savez, le problème avec les enseignants, c’est que le Gouvernement a hérité de ces questions, qui étaient prises en compte par l’Administration Wade par le principe de la continuité de l’Etat. Et sur ce point, le Chef de l’Etat a consenti des efforts, en ramenant l’indemnité de logement à 85.000 francs Cfa. Maintenant, l’erreur que le ministre Serigne Mbaye Thiam a commise, est qu’il ne devait pas prendre des engagements que l’Etat ne pourrait pas honorer. Il (Serigne Mbaye Thiam) a faussé les négociations dès le début du processus en n’ayant pas été sincère avec les enseignants. Il a faussé le jeu, dès le départ.

Face à une telle situation, il faut éviter de se voiler la face et se dire des vérités, en se regardant dans les yeux. L’Etat est pauvre et n’a pas les moyens d’accéder aux revendications des enseignants. Il en est de même pour les Agents de la santé. Exiger l’alignement dans la Fonction publique de tous les agents formés par l’Agence japonaise de coopération internationale (Jica), est chose impossible pour la bonne et simple raison que les caisses sont vides. L’Etat n’a pas les moyens de satisfaire toutes ces revendications. Quant au paiement des arriérés de salaire, la tutelle doit essayer de trouver les moyens de les restituer ».

SourceA : que pensez-vous du Projet de loi portant parrainage?

Lass Badiane : « c’est une mauvaise idée. Un mauvais dossier, il ne faut pas essayer de l’améliorer. Il faut le supprimer. Le parrainage n’apporte rien de bon. Ni pour l’opposition, ni pour le Président de la République, ni pour la Coalition Bby, encore moins pour la stabilité du pays. Surtout pour la stabilité du pays qui doit être le principal souci du Président Macky Sall. Quand l’opposition menace de ne rien épargner pour bloquer le passage de cette loi à l’Assemblée nationale, il faut en tenir compte. L’épisode du 23 juin 2011 devrait servir de leçon ».

SourceA: et on dirait que le combat va se corser, avec l’entrée du Mouvement «Y’en a marre» dans le combat contre le parrainage?

Lass Badiane: « le Mouvement Y’en a marre est une bande de maîtres chanteurs, qui se sont remplis les poches. Je les connais bien, ce sont des fouteurs de trouble. Ils ont bénéficié de faveurs de la part des autorités. Ce sont juste des activistes, qui ont perdu toute leur légitimité. Depuis quand on ne les a pas entendus? Ils ne sont pas des modèles pour la jeunesse, car ils n’ont rien apporté au pays. Ils n’ont jamais contribué à l’amélioration de la situation économique du pays. Ils ne peuvent mobiliser personne ».

SourceA: Parlez-nous un peu du Mouvement « Jëm kanam » que vous dirigez.

Lass Badiane: « le Mouvement « Jëm kanam est parti de nombreuses plaintes de la part des populations de Grand-Yoff. Nous nous sommes concertés, pour créer une structure qui puisse apporter de la plus-value. Et pour y arriver, on a voulu changer de paradigme, en instaurant un cadre, où chacun puisse donner ses idées et positions. C’est toute l’essence du Mouvement qui est, d’abord, un Mouvement de développement face à l’injustice, avant d’être politique. De Grand-Yoff jusqu’à Djidah Thiaroye Kaw, en passant par les Parcelles assainies, on fait tout pour inciter les jeunes et, surtout, les femmes à l’entreprenariat, afin de sortir de la précarité.

Ndèye Aminata DIAHAM

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