Emmanuel Macron est rentré à Paris au terme d’une visite d’Etat de deux jours à Washington. Conformément à ce qui était annoncé en amont, aucune décision majeure n’a été annoncée à l’issue de ce court séjour.
Le président français et le président américain n’ont fait aucun compromis sur les dossiers qui les opposent. Et tout au long de cette visite, il y a eu ce contraste étonnant : des démonstrations constantes d’affection entre les deux chefs d’Etat, mais un affrontement de plus en plus direct sur le fond des dossiers, relate notre correspondante à Washington, Anne Corpet.
Mardi, Donald Trump a ouvert les hostilités dans le bureau ovale avec une violente critique de l’accord sur le nucléaire iranien qu’Emmanuel Macron venait défendre (voir encadré). Au cours de la conférence de presse qui a suivi, le président américain a enfoncé le clou. « Si l’Iran nous menace d’une manière ou d’une autre, ils payeront un prix que peu de pays ont payé », a-t-il déclaré alors que le président français venait d’évoquer le nécessaire respect d’un peuple à la grande culture.
Mais mercredi devant le Congrès, le président français a pris sa revanche : tout au long de son long discours, il s’est employé à démonter la politique du président américain. Sur tous les sujets qui les opposent – Iran, commerce, environnement – le chef de l’Etat français a fait valoir son point de vue avec force, sous les applaudissements des parlementaires. « Je suis sûr qu’un jour les Etats-Unis réintégreront les accords de Paris », a ainsi lancé Emmanuel Macron, comme s’il se projetait déjà au-delà du mandat de Donald Trump.
Mais tout au long de ce match en deux rounds, les deux chefs d’Etat ont aussi affiché une entente plus que cordiale. Et la presse américaine – comme les « late shows » – s’est beaucoup épanchée sur la débauche de gestes affichés par les deux chefs d’Etat pour témoigner de la qualité de leur relation.
Pas d’inflexion
Les deux présidents semblent avoir tous deux trouvé avantage à maintenir un lien personnel serré. Pour Donald Trump, il s’agit de montrer qu’il a trouvé en Europe un partenaire qui lui témoigne de l’amitié, et qui plus est, un allié solide sur le plan militaire. Pour Emmanuel Macron, il est essentiel de maintenir une relation de proximité avec le président de la plus grande puissance mondiale.
Même s’il ne se fait pas d’illusion sur l’hôte de la Maison Blanche « Je ne crois pas aux transformations en une soirée nous ne sommes pas dans un conte de Charles Perrault », a déclaré le président français avant de conclure : « Dans la vie, une citrouille qui à minuit d’un seul coup se transforme en carrosse ça n’existe pas. »
■ Nucléaire iranien : vers un nouvel accord ?
Avec notre envoyée spéciale à Washington, Véronique Rigolet
Pas question pour Emmanuel Macron de rester les bras croisés alors qu’il estime plus que probable désormais que Donald Trump va décider de sortir de l’accord nucléaire iranien le 12 mai prochain. « Je ne sais pas quelle sera la décision américaine, a déclaré le président de la République française, mais l’analyse rationnelle de la totalité des déclarations du président Trump ne m’incite pas à penser qu’il fera tout pour maintenir le JCPOA [Joint Comprehensive Plan of Action, le nom officiel de l’accord sur le nucléaire iranien, ndlr]. »
D’où son initiative pour ce qu’il appelle un « new deal »,un nouvel accord sur le nucléaire iranien, qui renforcerait le premier. Les Européens ne sont pas véritablement emballés. Les Russes et les Iraniens le condamnent d’avance.
Mais pour le président français, il n’y a de toute façon pas d’autre choix : « Ce n’est pas mon accord. C’est notre stratégie telle qu’elle a été justement présentée et coordonnée avec l’ensemble de nos partenaires européens, je vous rassure. Donc là aussi, je ne suis pas en train de dire, c’est une formidable idée et tout le monde doit se ranger derrière. Je suis simplement en train de dire : qu’est-ce qu’on propose d’autre ? Je veux simplement construire les conditions d’un cadre raisonnable qui évite une escalade de tensions inconsidérées dans la région, si la décision américaine était de quitter le JCPOA. C’est ça mon point »
« Nous ne sommes pas de ceux qui changent facilement d’opinion », a lancé à plusieurs reprises Emmanuel Macron à Donald Trump durant sa visite d’Etat, « pas plus sur le nucléaire que sur les autres dossiers », a-t-il prévenu pour clore sa visite.