Au Soudan, l’armée n’était pas intervenue depuis le début de la contestation le 19 décembre dernier. Une mobilisation qui a pris de l’ampleur ce week-end. En effet, cela fait trois jours que des manifestants occupent une place à Khartoum pour réclamer le départ du président Omar el-Béchir, et ce, malgré l’état d’urgence. Ce lundi matin, pour la première fois, un accrochage a eu lieu entre les forces de sécurité qui cherchaient à disperser les manifestants et l’armée soudanaise.
Selon plusieurs témoins, l’incident a eu lieu à l’aube ce lundi. Il a opposé des militaires soudanais qui essayaient de protéger des manifestants à des éléments des forces de sécurité qui tentaient de disperser les contestataires rassemblés devant le quartier général de l’armée. Ce lieu, non loin du palais présidentiel, est occupé depuis samedi par les manifestants, qui y ont planté des tentes. Depuis dimanche, l’armée s’est déployée autour de ce complexe militaire.
La question est de savoir désormais si elle a clairement décidé de prendre position pour les manifestants. C’est ce que semblent rapporter plusieurs témoignages et c’est d’ailleurs ce que demandent les contestataires depuis le début de leur mouvement. Difficile néanmoins de savoir ce qui se joue actuellement, mais on sait que le président Omar el-Béchir a procédé, il y a quelques jours, à de nombreux changements à la tête de l’armée pour y nommer ses fidèles.
« Écouter les réclamations des manifestants »
L’incident de ce matin reflète peut-être des désaccords entre l’armée et les forces de sécurité. Il fait en tous les cas suite à un positionnement clair et nouveau du Conseil militaire et sécuritaire national. Suite à sa réunion avec Omar el-Béchir, cette instance a insisté hier sur la nécessité « d’écouter les réclamations des manifestants ».
Ce matin, sur le terrain, les tirs à balles réelles ont fait deux morts, dont un militaire, un officier. Selon le comité central des médecins soudanais, cinq personnes ont été tuées depuis samedi. L’hôpital Grand Royal a lancé un appel au renfort de médecins. Sur la situation à Khartoum peu d’informations filtrent. L’électricité est totalement coupée et il n’y a pas d’internet. La ville est fermée. Les forces de sécurité multiplient les barrages pour empêcher d’autres protestataires d’atteindre le lieu de rassemblement.
A la mi-journée, les forces de l’opposition signataires de l’annonce dite de « La liberté et du changement » ont déclaré le gouvernement illégal. Ce gouvernement a été nommé en mars 2019 pour résoudre la crise économique et la crise politique. Il est dirigé par Mohamed Taher Ayala.